Geof entraîna Jude avec lui, sur le quai Lincoln. Ils marchaient depuis environ dix minutes et n'avaient pas prononcé un mot depuis. Le brouillard commençait à s'éclaircir, signe que le lever du jour était proche, quand Jude saisit le bras de Geof et l'entraîna vivement derrière une benne et lui imposa le silence :
- Chhhh ! Regarde là-bas, au coin de l'entrepôt...
- Je ne vois rien... Ah si ! Une lumière de lampe torche ! Qui peut bien se balader par ici à cette heure-ci ?
- A part nous, lui répondit Jude, je pense que cela ne peut être que d'autres contrebandiers, comme Sullivan, mon ancien patron...
- Et là, regarde ! Une camionnette de location... Mais, ils transportent des caisses de boîtes de haricots ! Hey ! Mes haricots !
- Et regarde ici, le type avec un imper gris et un pantalon noir... C'est Sullivan, l'homme qui a ordonné l'exécution de Jack.
- Ok ! Cette affaire est maintenant devenue personnelle...

Jack ne semblait pas plaisanter en disant cela. Le silence était retombé comme il comptait et évaluait mentalement le nombre d'hommes présents et leurs capacités. Il était depuis longtemps expert dans l'art de sonder une personne. Il reprit la parole :
- Allez, viens, on va chez moi élaborer un plan de contre-attaque... Au fait, quel est cet entrepôt ?
- Ce doit être le dépôt qu'il utilise maintenant... Il a, je pense, préféré déserter l'endroit habituel, après ma disparition. En tout cas, il n'a pas perdu de temps pour le quitter !

Après être revenus en arrière jusqu'au précédent embranchement, ils se dirigèrent à grands pas vers la voiture-épave de Geof. Un quart d'heure après, ils se retrouvaient chez lui, dans un coquet petit appartement donnant sur Huntigton Beach. Geof décrocha d'un air décidé son téléphone et composa les numéros de différents de ses associés pour leur fixer un rendez-vous au crépuscule près de l'entrepôt de Sullivan.
Geof prit ensuite une douche, et, retournant vers sa chambre, il vit que Jude dormait déjà profondément, complètement écroulée sur son lit... Il résolut de la laisser dormir. Il l'installa un peu mieux, éteignit la lumière de la chambre, et s'éclipsa discrètement en direction du divan du salon sur lequel il s'endormit immédiatement. Il faisait entièrement confiance à Jude.
Il s'éveilla quand le soleil lui caressa le front et remarqua l'odeur de café frais qui flottait autour de lui... Il fut tout d'abord intrigué, car il vivait seul depuis que sa femme était partie. Il fut carrément étonné à la vue de Jude attablée et vêtue d'habits que sa femme avait oubliés, dans son départ précipité avec un beau jeune homme. Cependant, tous les événements de la veille lui revinrent en mémoire. Jude lui souhaita le bonjour avec un sourire et s'excusa :
- Pardonne moi, je n'ai pas pu m'empêcher de commencer... Ah oui, et j'ai aussi pioché un peu dans ta garde-robe. Tu es marié ?
Ayant vu la tête qu'il faisait, elle s'excusa de nouveau avec un petit sourire triste et lui servit résolument une grande chope de café. C'était de loin de petit déjeuner le plus joyeux que Geof prenait depuis longtemps. Il l'en remercia, puis continua :
- Nous avons encore plusieurs heures devant nous, c'est largement plus qu'il n'en faut pour nous préparer... Et sinon, tu as bien dormi ?
- Ah, oui impeccable ! Je dois t'avouer que cela faisait au moins deux jours que je n'avais pas fermé l'œil. Je commençais à avoir un sacré retard de sommeil ! A moi de te poser une question maintenant : qu'est-ce qu'on prépare pour Sullivan ?
- Ah ! Tu verras bien ! Dit-il avec un sourire en coin.

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